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Confins (Borders)

Bienvenue aux confins du monde citadin, là où la banlieue se confond avec la campagne, quand peu à peu les lotissements dortoirs laissent la nature enfin tranquille. C’est là que se trouve la résidence Ascot, construite brique après brique à Roissy-en-Brie par les architectes Martine et Philippe Deslandes au début des années 1970. Le lotissement, timide, se cache derrière une rangée de haies bien taillées, l’entrée est difficile à trouver. On dirait qu’il se protège des affres du monde extérieur, de la modernité industrialisée, où la laideur a trop souvent le dernier mot . Au milieu de maisons pastiches néo anciennes, affublées de fausses corniches et de frontons mal dessinés, cet ensemble élégant détonne.

 

J’ai grandi en banlieue, et depuis vingt ans que j’habite à Paris, j’ai toujours eu des rapports compliqués avec elle : ni vraiment campagne ni assez citadine à mon goût, j’ai tendance à la considérer comme un tout un peu gris, terne. Mais de temps à autre, par un heureux hasard, on tombe sur un lieu qui sort du lot, qui se démarque de ce qui l’entoure, où tout n’est que de l’à peu près, construit trop vite, trop tout court. La ville a grignoté, puis complètement absorbé la campagne, définitivement mitée. 

 

Ici la nature a bien poussé, les arbres sont hauts, c’est l’avantage d’avoir cinquante ans pour un lotissement, on y est noyé dans la verdure, là où les pavillons neufs sont plantés au milieu d’arbres pas plus gros que des cure dents. C’est vrai que ça change tout. 

 

Les 73 maisons sont desservies par des allées piétonnes, toutes en courbe, les voitures sont dissimulées derrière de hauts murs, dans des garages regroupés en cercles. Les façades en briques sont associées à des huisseries métalliques noires, souvent situées aux angles. L’unité de matériaux est remarquable et donne à l’ensemble un vrai cachet, en cohérence avec l’échelle domestique de la résidence, à taille humaine, contrairement aux grands ensembles construits à la même époque. 

 


Welcome to the edge of the urban world, where suburbia merges with the countryside, where dormitory housing estates gradually leave nature in peace at last. This is where you’ll find the Ascot residence, built brick by brick in Roissy-en-Brie by architects Martine and Philippe Deslandes in the early 1970s. The shy housing estate hides behind a row of well-trimmed hedges, and the entrance is hard to find. It seems to protect itself from the outside world, from industrialized modernity, where ugliness too often has the last word. In the midst of neo-antique pastiche houses with false cornices and badly designed pediments, this elegant ensemble stands out.

 

I grew up in the suburbs, and in the twenty years I've lived in Paris, I've always had a complicated relationship with it: neither really rural nor urban enough for my taste, I tend to see it as a rather gray, dull whole. But every now and then, by a happy coincidence, you come across a place that stands out from its surroundings, where everything was built too quickly. The city has nibbled, then completely absorbed the countryside, definitely shrunk.

 

Here, nature has grown well, the trees are tall, and that's the advantage of being fifty years old for a housing estate: you're surrounded by greenery, whereas new pavilions are planted in the middle of trees no bigger than toothpicks. It changes everything.

 

The 73 houses are served by pedestrian walkways, all of them curved, and the cars are hidden behind high walls, in garages grouped in circles. The brick facades are combined with black metal frames, often located at the corners. The unity of materials is remarkable, and gives the whole a real character, consistent with the domestic scale of the residence, at human size, unlike the large housing estates built at the same time.